Condamnations pénales et exclusion d’un candidat à l’attribution d’un marché : les précisions du Conseil d’Etat

Le Code de la commande publique (CCP) consacre, pour les différentes catégories de contrats publics, des motifs d’exclusion de candidatures. Ces exclusions peuvent être de « plein droit » ou laissées à l’appréciation de l’acheteur public.

Au titre de ces exclusions de plein droit, les articles L. 2141-1 du CCP pour ce qui concerne les contrats de marchés publics et L. 3123-1 pour les contrats de concessions, prévoient une exclusion – en principe, d’une durée de cinq ans – d’un candidat ayant fait l’objet d’une condamnation pénale définitive pour certaines infractions énumérées dans ces dispositions.

Se posait la question de savoir si un pouvoir adjudicateur peut exclure un candidat d’une consultation au motif que celui-ci a fait l’objet d’une condamnation pénale, pour l’une des infractions énumérées aux dispositions précitées, alors même que celui-ci a fait appel de ladite condamnation ?

Par une décision en date du 2 novembre 2022, le Conseil d’Etat a eu l’occasion de réponse à cette interrogation.

Dans les faits de l’espèce, la société Icare, candidate à l’attribution d’un accord-cadre de défense et de sécurité avait été évincée par le ministère des Armées au motif qu’une peine d’exclusion des marchés publics avait été prononcée à son encontre par un jugement du tribunal correctionnel de Paris du 29 juin 2021.

La société Icare qui avait fait appel de ce jugement a alors saisi le juge du  référé précontractuel qui a fait droit à sa demande en enjoignant à la ministre, si elle entendait poursuivre la passation du marché litigieux, de reprendre la procédure au stade de l’examen des candidatures.

Saisi d’un pourvoi en cassation par la ministre des Armées, le Conseil d’Etat énonce, par une lecture combinée de l’article L. 2141-4 du CCP, rendu applicable aux marchés de défense et de sécurité par l’article L. 2341-2 du même code, que « Sont exclues de la procédure de passation des marchés les personnes qui : (…) / 3° Ont été condamnées au titre du 5° de l’article 131-39 du Code pénal ou sont des personnes physiques condamnées à une peine d’exclusion des marchés. (…) » et de l’article 506 du Code de procédure pénale suivant lequel : « Pendant les délais d’appel et durant l’instance d’appel, il est sursis à l’exécution du jugement, sous réserve des dispositions des articles 464 (deuxième et troisième alinéas), 464-1, 464-2, 471, 507, 508 et 708 ».Ce faisant, la Haute juridiction retient « qu’une personne dont le jugement l’ayant condamnée à une peine d’exclusion des marchés n’est pas exécutoire en raison de l’appel formé à son encontre ne peut être exclue, pour ce motif, de la procédure de passation du marché ».

Le Conseil d’Etat, en avançant que le juges des référés saisi par la société Icare et que le pourvoi de la ministre des Armées devait être rejeté, considère donc qu’un candidat condamné à une peine d’exclusion des marchés et qui a interjeté appel de cette condamnation ne peut être exclue, pour ce motif, de la procédure de passation du marché.

 

Conseil d'État, 2 novembre 2022, « Ministre des armées », n°464479, Mentionné dans les tables du recueil Lebon

Jeudi, 22 Décembre, 2022 - 15:50